Un abri de combat en 3D : DV3
(sur la droite : arrivée du "Boyau de l'étang" à DV3 et sur la gauche départ du "Boyau d'Alterkirchen" vers l'étang de Vaux)
Cette étude, ainsi que la réalisation de la modélisation de DV3 que j'en ai faite ont été élaborées à partir de la lecture de " la note du Ministère de la Guerre - Génie - du 20 septembre 1898 " résumant les conditions d'établissement des abris de combat pour hommes " mais la précision de certains dessins 3D que j'ai réalisés n'a été rendue possible que grâce aux informations techniques et aux mesures très détaillées réalisées sur le terrain par Alexandre et Frédéric RADET.
Encore un grand merci à eux deux.
Il existe plusieurs types d'abris d'infanterie destinés à abriter un effectif d'hommes plus ou moins important :
Abri pour une compagnie (environ 220 hommes)
4 chambrées - 3 sorties en façade - latrines à 3 compartiments
et
Abri pour une 1/2 compagnie (environ 120 hommes = 2 sections de 60 hommes)
2 chambrées - 1 sortie en façade - latrines à 2 compartiments
Les deux abris d'infanterie situés dans le bois Fumin : DV3 et DV4, sont des abris pour une 1/2 compagnie de type "20 septembre 1898".
Note du Ministère de la guerre - Génie - résumant les conditions d'établissement des abris de combat pour hommes) pour demi compagnie (100 hommes) à deux chambrées (4x10m) perpendiculaires à la façade.
Ce sont des lieux de repos pour les troupes de garde, qu'y attendent le moment propice d'en sortir pour prendre part à la lutte et couronner les tranchées voisines. Ils sont placés soit dans les retranchements, soit en arrière d'eux, mais toujours à proximité ; leurs débouchés doivent être faciles et les communications qui les relients aux positions de combat doivent être aussi sûres que possibles. En principe, chaque abri sera organisé pour recevoir une 1/2 compagnie d'infanterie, soit 125 hommes assis sur des bancs.
Comme dans beaucoup de cas le plan type est adapté en fonction du terrain environnant. Concernant DV3 et DV4, une remise/pièce d'eau à été adjointe du côté opposé aux latrines.
Années de construction : entre 1906 et 1907.
Localisation :
DV3 est situé sur la croupe du bois Fumin, il est positionné au sommet d'une légère pente descendant vers l'étang de Vaux.
De par sa position non dissimulée et très repérable, le mur de dos de l'abri est donc particulièrement exposé aux tirs directs ennemis.
DV3 est situé à proximité immédiate du retranchement R3, juste en dessous.
DV4 est positionné à contre pente dans le col du ravin Fumin. La pente marquée protège le mur de dos et le flanc gauche de DV4.
DV4 est situé à la gauche du retranchement R1.
Les deux abris sont des jumeaux "miroirs" car leur murs d'aile de soutien (avec les latrines) sont inversés. A gauche pour DV3 et à droite pour DV4.
A force de bombardements répétés, les deux abris prendront au cours de l'année 1916 des physionomies très différentes de l'origine, notamment pour DV4.
La façade DV4 prend une toute autre allure avec notamment l'ouverture d'une seconde sortie en façade pour palier à la sortie latérale gauche obstruée.
Par la suite, points communs entre les deux abris : les murs de façade en simple maçonnerie de pierres, plus fragiles face aux projectiles, présenteront de grandes ouvertures béantes.
Afin de bien se rendre compte, voici sur cette photographie, ce que représente une section (environ 60 hommes) qui devait loger dans une chambrée ( 4x10 m = 40 m²)
(prêt de Arnaud Lebègue - forum Pages 14/18)
et une 1/2 compagnie de 120 hommes...
On comprends aisément la nécessité de la présence d'un système de ventilation dans l'abri de combat.
Dans un abri pour une 1/2 compagnie l'encadrement militaire est assuré par 15 gradés : officiers subalternes et sous-officiers. :
1 Lieutenant
1/2 compagnie
120 Hommes
1 Sous Lieutenant 1 Sous Lieutenant
1 Section 1 Section
60 Hommes 60 Hommes
1 Sergent 1 Sergent 1 Sergent 1 Sergent
1/2 section 1/2 section 1/2 section 1/2 section
30 Hommes 30 Hommes 30 Hommes 30 Hommes
1 Caporal 1 Caporal 1 Caporal 1 Caporal 1 Caporal 1 Caporal 1 Caporal 1 Caporal
1 Escouade 1 Escouade 1 Escouade 1 Escouade 1 Escouade 1 Escouade 1 Escouade 1 Escouade
15 Hommes 15 Hommes 15 Hommes 15 Hommes 15 Hommes 15 Hommes 15 Hommes 15 Hommes
Schématisation d'un abri de combat sur les canevas de tir
Il y a plusieurs types de schématisations qui vont nous indiquer, ou non, la position du " dos " de l'abri exposé au tirs directs et de la " gorge" dirigée vers la place et protégée des tirs directs.
Dès le début de l'année 1916, les tirs directs directs ennemis proviennent principalement du Nord et Nord Est de Verdun.
Lors de la construction des abris ceinturant Verdun, ce paramètre des " Tirs directs provenant du Nord- Nord Est " avait été intégré dans l'orientation des abris. Ils avaient donc été construits avec leur murs de "dos" plus épais et avec un degré de résistance supérieur, exposés vers le Nord.
On rencontre généralement 2 types de représentation des abris sur les canevas de tir de cette époque.
1 - Représentation par un carré (ou un rectangle) avec un petit ergot qui dépasse du carré.
La position de cet ergot indique la face non exposée aux tirs directs : la gorge.
Le mur de dos exposé aux tirs directs est représenté par la grande longueur du rectangle.
( abri VLL )
( abri DV3)
A quoi correspond cet ergot qui dépasse du carré dans la symbolisation des abris ?
Hypothèse possible : la symbolisation est basée sur le schéma d'un abri "type 1913" et non du "type 1898".
Les abris type 1913 avaient une caponnière de gorge pour défendre les deux entrées du mur de façade.
Le petit ergot représenterait donc la caponnière.
Abri de combat pour une 1/2 compagnie type 1913
2 - Représentation par un carré (ou un rectangle) sans petit ergot qui dépasse
DV3
DV4
Il est à noter que selon les dates d'édition des canevas de tir, l'orientation et la position de la gorge n'étaient pas toujours fidèles à la réalité de terrain.
exemple : DV2 - Nous savons que sur un canevas de tir, le Nord est situé en haut.
Les tirs directs ennemis proviennent du Nord Est (depuis la droite)
dessin suivant : canevas d'octobre 1916 (gorge mal orientée puisque soumise aux tirs directs venant de la droite)
canevas de juillet 1917 (gorge bien orientée)
LES ELEMENTS CONSTITUTIFS D'UN ABRI DE COMBAT POUR UNE 1/2 COMPAGNIE : DV3
Selon la note du 20 septembre 1898 et du 20 mai 1913 du ministère de la guerre, les abris de combats sont des éléments standardisés. Mais lors de leurs constructions, le choix des emplacemernts et les contraintes du terrain avoisinant chaque abri ont obligé à une adaptation des plans types 1898, amenant chaque abri à devenir un ouvrage unique de par ses aménagements extérieurs et intérieurs qui lui étaient propres.
Dans cette présentation de DV3, imaginons un " DV3 datant de la fin 1915 ", d'avant la bataille de février 1916, avant qu'il ne soit très métamorphosé par l'ampleur du nombre d'obus reçus durant l'année 1916.
Nous irons donc des fondations nues de l'ouvrage à l'ouvrage complet occupé par une 1/2 compagnie.
A l'aide de 200 schémas et 5 films, nous élaborerons la construction de DV3 en partant des structures générales pour zoomer ensuite vers le détail.
DV3 est composé de :
1 - MURS qui vont constituer :
- les fondations
- deux chambrées dont celle de droite avec un recoin pour l'aspirateur/ventilateur d'air
- un petit local pièce d'eau situé à droite
- un couloir
- une aile extérieure de soutien du terrassement, à gauche.
2 - DALLE supérieure de protection
3 - TERRASSEMENT constitué de massifs de rocaille et de terre
4 - CITERNE SOUTERRAINE
Située sous la chambrée droite, elle recueille les eaux pluviales et eaux d'infiltration provenant de la dalle supérieure.
5 - Chambrées (casemates) = chaque section (60 hommes) dispose de son local distinct et reste ainsi bien dans les mains de ses chefs.
Chaque chambrée est composée de :
- Entrée (baie) de la chambrée
- Baie de communication entre les deux chambrées
- Grille constituée de deux ventaux
- Structure métallique constituée de 6 montants verticaux et 6 barres transversales
- Bancs fixes et bancs rabattables
- Planches à bagages
- Râteliers pour fusils
- Système de ventilation artificielle (par des gaines) et naturelle (par des orifices)
- éclairage par des lampes à bougies.
6 - Couloir
Le couloir est situé derrière le mur anti-souffle, il longe la façade de l'abri et permet d'accéder aux chambrées et au petit local.
7 - Petit local
Du côté opposé aux latrines, réservé à l'approvisionnement en eau et accessoirement servant comme local pour l'officier de compagnie.
8 - Latrines extérieures (situées à gauche dans l'abri DV3)
composées de 2 compartiments et d'une fosse.
LES 8 PRINCIPAUX ELEMENTS EN DETAIL...
1) les MURS
MURS DE FONDATION
(Etude réalisée à partir de la simple lecture de la note du 20/09/1898 - les dessins sont mon interprétation de cette lecture, ils n'ont donc pas valeur de documents iconographiques véridiques)
Les murs de fondation sont situées sous les murs de pourtour, sous le niveau du sol. Ils sont en maçonnerie ordinaire de pierre.
Les "trous" destinés à recevoir la citerne (20m cube) et la fosse des latrines (4 m cube) sont creusés.
MURS DE POURTOUR
Il y a 2 types de murs de pourtour.
1 - Les murs exposés aux tirs directs ennemis
2 - Les murs non exposés aux tirs directs, dirigés vers la place de Verdun
Cette différence d'exposition va déterminer leur épaisseur, leur degré de résistance et donc leur degré de protection apportée.
A) MURS EXPOSES AUX TIRS DIRECTS
1 - MUR DE DOS : (ou mur de fond) face à l'ennemi, en béton spécial , c'est un mur plus épais car il est exposé initialement aux tirs directs ennemis.
épaisseur 2 m
Ce mur est couvert des coups dangeureux par un terrassement supplémentaire de 4 à 6 m de largeur en haut suivant qu'il sera massé en sable, en rocaille ou en terre ordinaire.
2 - MUR LATERAL DROIT (petits côtés - flancs) : de par sa position particulièrement exposée au danger (face au Nord) ce mur a une épaiseur de 2,00 m.
Les murs latéraux sont également recouverts par des massifs de terre ou de rocaille destinés à les protéger.
B) MURS NON EXPOSES AUX TIRS DIRECT
1 - MUR LATERAL GAUCHE
Le mur de flanc gauche non exposé aux tirs directs fait 1,60 m d'épaisseur.
2 - MUR DE REFEND OU PIEDROIT
Mur séparant les 2 chambrées, ouvert par une baie de 1,20 m de large permettant la communication et l'aération entre les deux chambrées.
Le rôle de la baie entre les deux chambrées est aussi de permettre une évacuation générale au cas où l'une des sorties des chambrées soit obstruée.
Il n'y a pas de banc en face de la baie entre les deux chambrées afin de faciliter la circulation générale dans l'abri.
3 - GORGE : c'est la partie protégée de l'abri. La gorge de l'abri, ce sont deux murs non soumis aux tirs directs et donc de construction moins épaisse et moins résistante que le mur de dos.
de part et d'autre du couloir il y a :
A - mur intérieur du couloir (côté chambrée) : épaisseur 1 m, en béton spécial
B - Mur anti-souffle ou mur de masque (en façade)
Epaisseur : 1,60 m en maçonnerie de pierres (hourdée en mortier de ciment).
Ce mur est plus épais à sa base et va en se retrécissant légèrement vers le haut, jusqu'au niveau haut des baies d'entrées.
Le rôle de ce mur de masque est de protéger les deux entrées des chambrées contre le souffle et les éclats de projectiles.
L'entrée du mur anti-souffle est dans l'axe du mur de refend, elle est donc contrariée par rapport aux deux entrées des chambrées, ce qui assure ainsi la protection des chambrées.
Le mur de soutien
Il n'y a qu'un seul mur de soutien chez DV3 (et DV4) contrairement à d'autres abris de combat qui avaient deux "ailes" de chaque côté ou une "aile" + un mur de soutien perpendiculaire.
DV3 à son mur de soutien à gauche.
L'épaisseur du mur de soutien est suffisante pour y intégrer les latrines à deux compartiments.
les latrines font un mètre de profondeur, procurant ainsi aux hommes qui les occupent de façon momentanée, une protection suffisante.
Le rôle du mur de soutien est de retenir le terrassement de rocaille et de terre qui protège le mur latéral gauche.
Le mur de soutien est plus étroit à sa base (1,30 m) que dans sa hauteur (2,35 m )
2) le plafond = DALLE EN BETON ARMé
1,60 m d'épaisseur
Les surfaces sont planes, à angle droit et sans arrondis.
La dalle à une légère pente de l'avant vers l'arrière pour assurer l'écoulement des eaux d'infiltration et eaux pluviales.
L'armature est formée de 9 couche de quadrillages distants entre eux de 20 cm, ce qui correspond à un dosage d'environ 70 kg d'acier par mètre cube de maçonnerie.
Sur cette vue d'époque de DV3, les bombardements ont considérablement rongé le béton lisse de la façade, remettant à jour les couches de grillage.
Actuellement le grillage au niveau de l'entrée de DV3 est toujours bien visible.
3) le TERRASSEMENT
Les massifs sont en terre et en rocaille.
Leur rôle est d'apporter une protection supplémentaire aux murs soumis aux tirs ennemis.
Sur environ 4 à 6 mètres, les massifs sont de la même hauteur que les murs de pourtour, puis ils prennent une pente douce jusqu'au niveau du sol sur 10 à 12 mètres.
Le terrassement de terre réalisé avec les mêmes matériaux que le terrain avoisinant rend l'abri presque indécelable aux yeux des observateurs aériens.
(DV3 vue depuis une altitude de 1000 m)
Film : Les éléménts muraux constituants DV3.
durée 3 mn
4) la CITERNE SOUTERRAINE
La citerne est installée sous la chambrée (droite) à l'opposé des latrines (pour éviter une éventuelle contamination de l'eau potable).
C'est une citerne à double paroi, constituée d'une cave renfermant une cuve en ciment armé, couverte et munie d'une cloison séparatrice.
la cave :
La cuve avec sa cloison :
dimension de chaque bassin :
longueur : 3.50m
largeur : 1.40 m
hauteur : 2.10 m
volume : environ 10 mètre cube x 2 = 20 mètres cube
La double paroi de la citerne permet donc un contournement par une gaine de circulation faisant 50 cm de large.
L'accès à la gaine de circulation se fait dans le fond de la chambrée de droite, par une trappe (60 x 60 cm) prolongée de 12 barreaux en fer scéllés dans le mur.
Il y a deux autres regards qui permettent un accès aux 2 cuves
Une pompe à bras élève l'eau au niveau du petit local afin d'assurer l'approvisionnement journalier en eau.
A l'intérieur de chaque cuve, on distingue sous le regard, le tuyau de pompage de l'eau vers la pompe à bras.
Un grille d'évacuation de l'eau (côté façade) assure l'assèchement de la cave.
La citerne est alimentée par les eaux pluviales et les eaux d'infiltration provenant de la dalle de l'abri légèrement en pente.
Sur la dalle, se superposent une couche de sable et gravier puis une couche de terre pour le gazon.
Les eaux pluviales recueillies passent par une série de filtre à sable (situés sous le petit local) avant de rejoindre les 2 cuves.
La galerie souterraine de DV3
La citerne aussi est le point de départ d'une galerie souterraine étayée avec du châssis coffrant typiquement allemand.
Un trou a été creusé dans le mur de la gaine de circulation côté mur de dos pour accéder à une galerie.
La galerie prend une descente sur environ 4 m pour bifurquer vers la gauche sur 2 m. A ce niveau elle ne va pas plus loin.
Cette galerie était destinée à être une "issue de secours" pour les citernes reconverties en abris supplémentaires pour les hommes. La sortie de cette issue de secours aurait du se faire côté nord de DV3, zone d'entrée et de sortie dans l'abri DV3 théoriquement moins exposée aux tirs français.
Les murs de la citerne ouverts...
L'origine de la galerie et du percement des murs de la citerne sont évoqués dans la rubrique concernant DV3 .
5) les CHAMBREES = CASEMATES
Il y a 2 chambrées presque identiques (l'une comporte un recoin pour l'aspirateur/ventilateur d'air frais)
Dimension : 4 x 10 m
Surface : 40 m²
PLAFOND
Hauteur de plafond de 4 m à l'entrée et 3,75 m
Le plafond des chambrées est en pente avec un maximum de hauteur de 4 m au niveau du mur du couloir.
La légère pente de l'avant vers l'arrière assure l'écoulement des eaux d'infiltration et eaux pluviales.
La dalle supérieure est en béton armé de 1,60 m d'épaisseur.
ENTREES DES CHAMBREES : BAIES
1,20 m de largeur - 4,00 m de hauteur
GRILLES des ENTREES DES CHAMBREES et du PETIT LOCAL
A l'entrée de chaque chambrée il y a une grille constituée de deux vantaux en fer rond reliés par des fers plats.
Chaque vantail fait 60 cm de large.
Un des vantaux de chaque grille est muni d'une grosse serrure. L'autre ventail est muni d'une barre pivotante pour maintenir les deux vantaux alignés lorsque la grille est fermée.
Les grilles sont sans revêtement, toutefois en cas de chauffage des chambrées (pôele ou cheminée), les grilles peuvent être obstruées au moyen de portières en toile ou en nattes suspendues et appuyées contre les grilles.
Les grilles sont munies dans leur parties supérieures, de double crochets pour l'accrochage des "portières" en toile.
Les doubles crochets permettent de positionner les "portières en toile" sur un côté ou deux côtés de la grille apportant ainsi plus de calfeutrage.
On distingue 4 petites pattes métalliques ancrées dans le mur ayant pour fonction de maintenir la grille plaquée contre le mur en position ouverte.
Les ventaux des grilles ne font pas la hauteur de la baie afin de permettre leur ouverture même en cas d'un éventuel affaissement du plafond après un bombardement.
STRUCTURE METALLIQUE : Montants et barres transversales
Il y a 6 montants métalliques par chambrée.
Il y a donc 12 montants dans l'abri.
La répartition et l'espacement entre les montants sur les 10 m de profondeur de la chambrée n'est pas égale, mais il semble qu'à un grand espacement (environ 2,00m) soit juxtaposé un espacement plus réduit ( environ 1,50m)
L'espacement en face de la baie est de la largeur de la baie pour permettre le passage.
Ces montants ont une forme en U
Le rôle de ces montants verticaux est d'être les supports de :
- cornières métalliques horizontales en hauteur
Les 6 cornières horizontales servent elles mêmes de support à 2 autres longues cornières >10m (du mur de fond de la chambrée au mur anti-souffle) servant à maintenir la gaine de ventilation haute.
Les 6 montants verticaux sont aussi les supports des :
(de bas en haut)
- 2 rangées centrales de bancs (système de barre pivotantes et crochets)
- dossiers des bancs (vissage par écrous à tête arrondies pour ne pas blesser le dos du soldat)
- supports de crosse du râtelier (2 pattes métalliques dont une insérée dans le U du montant)
- équerres en fer support des demi-lune du râtelier (tenue chacune par un gros crochet idem planche à bagages)
BANCS
L'abri DV3 est organisé pour recevoir une 1/2 compagnie, soit environ 120 hommes assis sur des bancs.
Il y a 4 rangées de bancs par chambrée soit 8 rangées au total.
Selon leur emplacement dans la chambrées, les bancs sont soit:
- Fixes
- Rabattables vers le bas
1 - contre les murs latéraux : bancs fixes
Les bancs placés le long du mur de réfend (celui qui sépare les 2 chambrées) sont fixes
Les deux rangées centrales de bancs sont constituées de bancs à rabattement de façon à permettre le dégagement de la circulation.
Les bancs du centre avaient un dossier en bois de 10 cm de large vissés sur les montants métalliques verticaux.
Supports métalliques pour les bancs fixes
(ce sont généralement les seules traces encore existantes dans les abris actuels)
Système de longs crochets, d'anneaux et de barres pivotantes permettant le rabattement des bancs centraux :
Organisation des places assises : au maximum 65 places assises
bancs fixes mur latéral : 17 à 20 hommes
bancs rabattables : 14 x 2 : 28 hommes
bancs fixes mur de refend : 17
Il y a un passage entre les bancs face à la baie de communication entre les chambrées.
PLANCHES A BAGAGES
Il s'agit de planches en bois d'une trentaine de cm de large, positionnées en hauteur (2,05 m) au dessus des bancs fixes et destinées à recevoir tous les équipements des soldats.
Il n'y a pas de planche à bagages au centre car les montants métalliques servent à supporter des râteliers.
Les planches sont posées sur d'imposantes équerres en fer, elles mêmes tenues aux murs par de gros crochets.
Dans l'abri DV3, il n'y a pas de crochet muraux sous les planches à bagages destinés à accrocher les musettes, bidons et autres équipements. De simples pointes et petits crochets à même les planches servent à disposer tout le matériel à courroie.
Comme il n'y a pas de planches à bagages au dessus des bancs rabattables centraux, les équipements des 120 hommes de la compagnie doivent tenir sur les 35 mètres linéaires des planches, ce qui donne un aspect "très fourni" aux planches à bagages quand la compagnie entière occupe l'abri.
RÂTELIERS POUR FUSILS
Les râteliers en bois sont constitués de deux parties :
en bas - Supports des crosses
en haut - Demi-lune pour retenir le haut des canons de fusils
Les supports de crosses sont fixés aux montants verticaux par deux pattes métalliques.
Pas de râtelier donc pas de patte métallique au niveau du passage en face de la baie faisant communiquer les deux chambrées.
Le bois des supports de crosse fait 14 cm de large, il englobe le montant métallique.
Les demi-lune sont fixées sur les mêmes grosses équerres en fer que les équerres des planches à bagages.
Ces équerres sont néanmoins plus courtes.
Les équerres en fer sont tenues aux montants par de gros crochets métalliques identiques à ceux supportants les équerres des planches à bagages.
L'ensemble du râtelier vide, prêt à recevoir une soixantaine de fusils.
Les fusils sont disposés en quinconce.
Une vue d'ensemble râtelier + bancs centraux rabattables
ECLAIRAGE
note du 20 septembre 1898 - Génie - Ministère de la guerre
" Chaque casemate sera éclairée, la nuit, par 2 lampes, dont les produits de la combustion seront évacués par des tuyaux en fonte coudée, noyés dans la dalle en béton armé ".
L'éclairage se fait par des lanternes de voiture modèle 1898 avec supports spéciaux
Il s'agit de lanternes à trois glaces, permettant d'éviter les mouvements d'air pouvant provoquer l'extinction de la bougie. Elles sont munies d'un dispositif à ressort dans la queue permettant d'avoir en permanence la mèche de la bougie en hauteur. Elles brûlent des bougies ordinaires de 2,1 cm de diamètre et de 18 cm de longueur.
Les lanternes ont un réflecteur avec une partie parabolique au centre pour réfléchir la lumière.
Elles sont maintenues par une fixation métallique scellée dans le mur.
Pour remplacer la bougie, il suffit de dévisser la queue de la lanterne sans qu'il soit nécessaire de décrocher l'appareil.
Emplacement des lanternes
Au fond de chaque chambrée, une cheminée coudée de 0,25m de diamètre permet l'évacuation des fumées des bougies.
La lanterne posée sur son support métallique.
Dans le recoin à la sortie de la chambrée
Dans le couloir
VENTILATION & AERATION
Compte tenu du grand nombre d'hommes (120) séjournant dans un espace réduit (2 x 40 m²), une aération dans chacune des chambrées est nécessaire.
Il y a 2 types d'aération.
1 - L'aérage naturel, facilité par la pente donnée à la dalle du plafond, plus haute vers les baies d'entrée. L'air vicié s'échappant naturellement par les entrées.
2 - la ventilation artificielle : constituée de cheminées, gaines de ventilation + un aspirateur/ventilateur d'air frais.
Il y a 2 types de gaines : gaines au sol et gaines aériennes
A - les gaines au sol : situées sous les bancs et percées de grands orifices rectangulaires, elles envoient et dispercent de l'air frais dans la chambrée.
La gaine au sol traverse le mur de cloison entre les 2 chambrées.
B - les gaines aériennes : situées en hauteur sous le plafond et maintenues par un système de 6 montants métalliques.
Les gaines en tôle ont une forme de U et ne sont pas tout a fait plaquées contre le plafond (espace d'environ 1.5 cm) afin de laisser pénétrer l'air vicié stagnant en haut des chambrées.
Les gaines aériennes évacuent l'air vicié vers les 2 cheminées extérieures du mur de façade.
Evacuation également de l'air vicié vers les 2 cheminées du mur de dos.
Deux orifices d'aération ronds de gros diamètre (0,25 m), situés dans le fond des chambrées, ils se prolongent par deux cheminées extérieures coudées en fonte, noyées dans le mur, aboutissant à l'extérieur au dessus de la dalle.
La sortie de ces cheminées est protégée par un "chapeau conique"
Les deux orifices sont dans l'axe des gaines de ventilation aérienne.
Il n'y a qu'un seul Aspirateur/ventilateur pour propulser l'air dans les deux chambrées. La gaine au sol traverse de part en part le mur de refend dans le fond de la chambrée.
Cet aspirateur/ventilateur d'air frais se trouve dans un petit recoin d'une des chambrées.
Le moteur de l'aspirateur d'air frais est sur la gauche, il est actionné par 2 manivelles et est manoeuvré par deux soldats de la compagnie qui se relayent.
1er temps : Aspiration
L'air frais est capté par une cheminée se trouvant en façade, côté gorge.
L'air frais est conduit vers l'aspirateur par une gaine d'aspiration ronde qui passe par une saignée (carrée) faite dans le mur anti-souffle côté couloir
Pour traverser le couloir la gaine d'aspiration est noyée dans le béton du sol avant d'arriver à l'aspirateur d'air.
2ème temps : Ventilation
Après son passage dans le ventilateur, l'air frais est expulsé dans une gaine de section rectangulaire noyée dans le sol avant de rejoindre les gaines de ventilation sous les bancs.
L'air frais est réparti et distribué dans les deux chambrées grâce à ces gaines.
Circulation d'air : arrivée de l'air frais par une cheminée et évacuation de l'air vicié par quatre cheminées.
Photographie de l'abri DV1 (intitulée à tort Fort de Douaumont"...) et sortie des cheminées.
(source : extrait photographie DV1 de Denis Jolibois)
Sans "refaire l'histoire" et sans bien sûr manquer de respect aux nombreux poilus qui ont certaniement transpirés en actionnant les manivelles du ventilateur, voici ce qui aurait pu succiter et motiver l'ardeur des volontaires à la manivelle...
film : Système de ventilation de l'abri DV3
De nos jours il est encore possible de pénétrer (quand ce n'est pas interdit) dans les chambrées de certains abris de la place de Verdun.
Généralement les seuls témoins encore visibles des équipements d'une chambrée sont les pieds rouillés des bancs fixes, les montants métalliques et parfois des restes de gaines de ventilation.
6) le COULOIR
Le couloir fait 16 m de long.
Il longe toute la façade de l'abri, protégé par le mur anti-souffle.
Il est également protégé par la dalle qui se prolonge jusqu'au dessus du mur anti-souffle.
Le couloir permet une communication avec l'extérieur et l'intérieur de l'abri par 6 baies de 4,00 m de hauteur x 1,20 m de large.
- avec l'extérieur par deux entrées/sorties latérales et une entrée/sortie centrale
- avec l'intérieur par deux entrées/sorties des chambrées et une entrée/sortie du petit local.
Dans le couloir se trouvent les trois imposantes grilles qui possèdent chacune un verrou. Les deux chambrées et le petit local peuvent donc être fermés. Les deux portes des latrines fermant aussi à clés, seul le couloir est laissé au libre passage.
Les deux gaines aériennes de ventilation traversent le couloir au niveau du plafond pour rejoindre les cheminées en façade.
L'éclairage se fait par deux lanternes à bougie.
Point de passage qu'il convient en théorie de laisser libre pour faciliter une évacuation rapide de l'abri.
Mais il peut être le lieu de stockage provisoire du matériel.
Dans le couloir on peut trouver des bancs supplémentaires pour accueillir un effectif plus élevé en hommes.
7) le PETIT LOCAL
Lieu de collecte des eaux pluviales recueillies sur la dalle supérieure de l'abri.
Il sert aussi de local pour les officiers de sections et de compagnie.
Dans un des recoins du sol, on trouve un regard sous le lequel il y a une partie du système de filtration de l'eau.
Il s'agit d'un des filtres à sable disposés sur le circuit de collecte des eaux pluviales.
En cas de bombardement le système de collecte de l'eau peut être fermé pour éviter la contamination de la cuve souterraine.
Dans le petit recoin à la sortie du local se trouve une pompe à bras maintenue sur un support en bois.
Elle permet de remonter depuis la citerne sous-terraine, l'eau nécessaire aux besoins quotidiens.
Bien que très réduit, le petit local est aussi utilisé par l'officier de 1/2 compagnie : un Lieutenant et les officiciers de sections : 2 sous Lieutenants.
8 ) les LATRINES EXTERIEURES
Situées au niveau du mur de soutien, dans une cavité de 1 mètre de profondeur.
Hauteur : 2,14 m
Elles sont situées côté opposé à la citerne souterraine pour éviter une éventuelle contamination de l'eau potable.
La fosse de 4m cube environ est rendue particulièrement étanche par un bac isolé en ciment armé placé dans une fosse asséchée par un égout. La fosse est munie d'un trop plein à un côte inférieure à celle des chambrées.
Il y a un regard à la sortie du couloir, permettant le curage de la fosse.
(Concernant la fosse des latrines, son étude est réalisée à partir de la simple lecture de la note du 20/09/1898 - les dessins de la fosse sont mon interprétation de cette lecture, ils n'ont donc pas valeur de documents iconographiques véridiques)
Le bac étanche
Les deux " trous " communiquant avec le bac.
Les latrines sont à deux compartiments séparés par un mur (3 compartiments pour les abris pour une compagnie).
Les montants métalliques supports des portes.
Les deux portes en tôle munies de système de fermeture à crochet et à serrure ainsi que d'une poignée.
Les latrines lors de leur utilisation...
dans la file d'attente...
VUES EN SECTION DE DV3
Mur de dos enlevé
Mur de flanc droit et mur intérieur du couloir enlevés
Mur de flanc gauche enlevé
Mur anti-souffle, mur intérieur du couloir et mur du petit local enlevés
Dalle supérieure enlevée
Dimension d'un abri d'infanterie pour 1/2 compagnie :
L'abri en lui même a une forme presque carrée (16x13m) avec de chaque côté des "ailes" que forment le mur de soutien d'un côté et le petit local, de l'autre côté.
Profondeur : 2 m (mur de dos face à l'ennemi) + 10 m (longueur de la chambrée) + 1 m (mur du couloir) + 1,20 m (couloir) + 1,60 m (mur anti-souffle) = environ 16 m.
Largeur: 1,60 m (mur de flanc gauche) + 4 m (largeur de la chambrée) + 1 m (mur de refend séparant les 2 chambrées) + 4 m (largeur de la deuxième chambrée) + 2 m (mur de flanc droit exposé aux tirs directs) = environ 13 m.
Les massifs de protection supplémentaires, en terre et rocaille, disposés sur 3 des 4 faces de l'abri font 4 à 6 m de large en hauteur puis prennent une pente douce jusqu'au sol sur environ 10 m, ce qui donne un aspect rectangulaire à DV3 lorsqu'on l'observe en vue aérienne.
40 x 30 m
16 x 13 m
ANNEXE
Ci après quelques éléments constitutifs d'un abri d'infanterie qui ne sont pas représentatifs de DV3 mais qu'il me semblait intéressant de présenter.
CHAUFFAGE
Selon les conditions climatiques, il pouvait y avoir un système de chauffage dans les chambrées = poêle ou cheminée.
Le chauffage pouvait être installé à différents endroits :
- Dans le recoin de l'entrée de la chambrée
- Pile en face de l'entrée de la chambrée juste devant les bancs rabattables centraux
- Dans le fond de la chambrée au dessous de l'orifice d'aération
Les portières en toile accrochées aux grilles permettent de garder la chaleur dans la chambrée.
Chaque chambrée dispose de son poêle.
L'évacuation des fumées se fait par un conduit qui se prolonge directement à travers le haut du couloir pour ressortir en façade par un orifice prévu à cet effet dans le mur anti-souffle.
Les conduits d'évacuation des fumées passent entre la gaine de ventilation aérienne et le haut de le grille.
Principe des BANCS TRANSFORMABLES EN COUCHETTES
L'idée est de permettre à une partie de l'effectif d'avoir un repos complet "allongé" plus réparateur qu'un repos "assis".
Note du Ministère de la guerre du 20 septembre 1898
Quand les lits inférieurs inférieurs sont rabattus, l'abri comporte 68 places couchées et 60 places assises ; la troupe peut alors s'y reposer par fractions dans des conditions convenables. A certaines périodes du siège, les occupants pouvant être appelés à s'y tenir pendant un temps assez long sans pouvoir y circuler à l'extérieur, sans cette organisation de couchette il en résulterait une trop grande fatigue si les hommes se trouvaient dans l'obligation d'y rester tous constamment assis pendant de longues heures avec une liberté de mouvement très limitée. En permettant un repos complet à la moitié de l'effectif, on se trouve dans des conditions satisfaisantes au point de vue de la conservation des forces et de la santé des troupes.
Système de couchettes rabattables à un seul niveau
Dans une chambrée la hauteur sous plafond importante de 4,00 m est en partie explicable par le fait que certains abris de combat disposaient de 2 hauteurs de lits superposés, afin de fournir plus d'emplacements de repos aux hommes.
Les couchettes du bas étaient rabattables et celles du haut étaient fixes sur des montants métalliques
Les couchettes sont à rabattement afin que l'abri puisse être rendu rapidement à sa destination normale permettant à 125 hommes assis de sortir en armes au premier signal.